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Définitions

«Waterfront development»

Événement urbain des années 1980, ce type de requalification de friche répond aux transformations subies par le commerce maritime. Tous les fronts de mer requalifiés partagent ces deux points communs respectivement en termes de design et de types de partenariats : ils cherchent à relier la ville et le port (visuellement et physiquement) et mettent en Å“uvre des partenariats public-privé inédits (transferts de terres publiques, processus de décision).

(Caves, Encyclopedia of the City)

 

«Waterfront (promenade)»

Environnement pour piétons en marge d'une étendue d'eau, endroit près des quais et converti en espaces commerciaux et résidentiels modernes.

(Evert, Encyclopedic Dictionnairy of Landscape and Urban Planning)

 

«Water's edge»

Espaces désengagés, transformés en développements modernes avec attrait touristique.

(Evert, Encyclopedic Dictionnairy of Landscape and Urban Planning)

 

Le waterfront, à la fois fenêtre et interface

Après ces définitions assez encyclopédiques, il est intéressant de passer du côté de la littérature scientifique produite sur le sujet afin d’en survoler les interprétations.

 

Tout d’abord, les villes portuaires ont un caractère distinct. Elles sont l’hôte de tensions entre leur identité urbaine et leur identité maritime. En Europe, le côté maritime prône, comme ce fut le cas quand Puerto Madero en était à ses débuts et visait le développement de ses activités portuaires. En Amérique, c’est plutôt la notion de urban renewal qui attire et le projet de revitalisation des années 1990 qui nous intéresse particulièrement répond davantage à ces impératifs. Ci-contre, la figure nous vient de Hoyle (2000) et dresse le portrait des tensions en cause au sein d’une ville portuaire. Les activités portuaires (1), originellement centrales dans leur relation à l’espace, migrent éventuellement vers d’autres ports situés en amont ou en aval. Puerto Nuevo, par exemple, a pris le dessus rapidement sur Puerto Madero en termes d’activités portuaires commerciales. Les industries délaissent le port (2), s’éloignent petit à petit vers des endroits plus rentables comme les banlieues. Sont laissés derrières les divers usages terrestres (3) et maritimes (4) qui se font compétition pour l’espace central. Le Yatchclub et les nombreux restaurants, cafés et hôtels bordant Puerto Madero de part et d’autre de l’interface port-ville sont une manifestation de cette mise en tension toujours présente entre les deux types d’activités terrestre et maritime.

 

 

Waterfront

Forces et tendances en revitalisation de waterfront

Hoyle, 2000

Étapes de l'évolution de la relation entre port et ville

Hoyle, 2000

Forces et tendances en revitalisation de waterfront

Hoyle, 2000

Ensuite, le caractère distinct des villes portuaires s’est illustré différemment au fil des époques comme le présente à nouveau Hoyle (2000), ci-contre. D’abord, la ville et le port de l’époque médiévale au 19e siècle étaient imbriqués, indissociables (1). Puis, le port et ses activités prennent beaucoup d’expansion au détriment de la ville (2) au début du 20e siècle. Vers la moitié du 20e siècle (3), la ville rattrape le port en terme de croissance avec l’expansion de l’industrialisation. Dans les années 1960-1980 (4), la ville et le port, tous deux forts de leurs activités respectives, paraissent scindés. Leur développement n’étant plus dépendant l’un de l’autre. Les années 1970-1990 (5) voient les fronts de mer regagner en intérêt, sans que leur existence soit réellement associée au port. En fait, à partir des années 1980, plus besoin ni d’un accès à la mer ni d’activité portuaire; les waterfronts adjacents à toutes sortes de cours d’eau (même artificiels!) deviennent l’objet de grands projets de revitalisation.

 

Les projets de revitalisation (1980 à ce jour, [6]) rappellent l’association du début entre ville et port; on cherche l’arrimage sans que la symbiose ne soit complète. Puerto Madero, et son histoire, se calque plus ou moins sur ces étapes tirées des innombrables expériences à l’échelle mondiale. De presque superposés au tout début de leur histoire, le port et la ville de Puerto Madero n’ont pas eu la chance de croitre à la même vitesse. Le port a eu beaucoup plus de difficultés que la ville à se garder à flot (!). Le renouveau des années 1990 et le désir de réunir les habitants avec l’étendue d’eau, l’époque contemporaine de Puerto Madero, s’imbrique davantage à la théorie.

 

Puis, en ces temps de globalisation et afin de rester compétitives et attractives de talents et de capitaux, les villes cherchent à se surpasser en termes d’infrastructures et de projets. Puerto Madero ne fait pas exception et son projet récent de revitalisation lui a permis de se doter d’espaces publics et d’édifices impressionnants. Même, la plus haute tour d’Amérique latine planifie de s’y implanter. Encore une fois, Hoyle (2000) présente une figure qui illustre combien, une fois tous les intérêts pris en compte et les différentes autorités ayant statué sur le sujet et s’étant entendu sur une stratégie, ce sont surtout les intérêts commerciaux qui priment sur les intérêts sociaux. Ce phénomène s’observe également avant (T1) la formulation des nouvelles stratégies visant la requalification et la revitalisation du waterfront, mais il est exacerbé par la suite (T2). Pour Puerto Madero, il en sera fait cas plus tard, ce n’est pas tout à fait faux. Même si le modèle de gestion en partenariat public-privé a permis au gouvernement de rester impliqué, il ressort que les populations déplacées ou celles déjà pauvres qui demeurent dans les quartiers avoisinants n’ont pas touché les bénéfices de la réalisation de ce projet.

 

Enfin, il est intéressant d’avoir une vision un peu plus ancrée dans la réalité de ce qu’est un waterfront et de comment celui de Puerto Madero s’inscrit dans cette tendance. Le front de mer se veut ainsi une vitrine des opportunités présentes sur le territoire, au même titre qu'un port commercial fait office de porte d'entrée invitant aux interactions.  Il est ainsi presque devenu une mode de souhaiter revitaliser les espaces en bordure d'étendues d'eau (quelles qu'elles soient [lacs, rivières, etc.]) et c'est une activité qui prend forme à toutes les échelles (globale et locale) et à tous les niveaux (pays développés et pays en voie de développement ; le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni et le Japon ne donnent pas leur place et l’Inde a beaucoup de potentiel). Bien qu’il soit souvent associé à un luxe que ne pourraient s’offrir que les économies développées, au contraire : le waterfront est de plus en plus associé à l’apport de service, la montée du tourisme, etc.

Quatre organisations internationales se consacrent aux fronts de mer: Waterfront Center à Washington, Centro Internazionale Citta d’Acqua (Venise), Association internationale Villes et Ports (AIVP) et Japanese Waterfront Vitalization and Environement Research Center (WAVE). Au fur et à mesure qu’il se diffuse, le waterfront et les recherches qu’ils suscitent sollicitent de nombreuses disciplines pour analyser et réaliser sa rénovation, par exemple la géographie, l'architecture, la planification urbaine, la politique, etc.

 

Bien que les questions environnementales, communautaires et de transport soient intrinsèquement liées à la revitalisation d’un front de mer, elles ne sont pas toujours toutes bien intégrées aux projets. Dans le cas de Puerto Madero, le réseau de transports manque encore de connexion avec le front de mer pour qu’il devienne possible de dire que le système est efficace. La perméabilité sera plus largement investie dans la section éponyme qui suit.

Certains auteurs y vont de grille d’analyse et de concepts afin de dire si un projet urbain de waterfront est un succès. Une des évaluations pertinentes (nous venant d’Hoyle, 2000, et reprise par Keeling, 2005) consiste à s’assurer qu’un waterfront intègre à la fois le passé et le présent, les intérêts divergents et la communauté au sein du projet. Seulement lorsque ces trois conditions sont remplies peut-on prétendre être en présence d’un waterfront de qualité. Ces conditions seront évaluées plus loin en conclusion au regard du projet de Puerto Madero, une fois qu’il aura été présenté dans son ensemble. Du côté de la communauté, les demandes usuelles sont de l’ordre de la conservation d’un accès à l’eau, de l’imbrication de la zone portuaire à la zone urbaine, de la conservation également de l’environnement et de repères historiques.

(AFP, 2014; Keeling, 2005; Hoyle, 2000)

Exemples de fronts de mer à travers le monde

Project for public spaces, 2014

(Double-cliquez sur une image pour en décourir l'emplacement.)

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